Œuvres et Cultures

De manière historique et comparative, les sciences de la culture ont pour objectif de décrire, la diversité humaine : celle des individus et des populations, celle des ethnies et des nations, celle des langues, celle des cultures. De même que les langues composent le langage, ces cultures composent la culture mondiale ; faite d’emprunts, d’émulations, de rivalités, elle est ou du moins doit pouvoir être accessible à tous et à chacun.

L’objectivité paradoxale de la culture est concrétisée par les œuvres : cette objectivité n’a rien de chosiste, puisque les œuvres ne cessent de se transformer en d’autres œuvres selon des lois morphologiques qui témoignent d’une légalité propre de la culture, différente de celle du monde physique comme de celui des représentations mentales.

Les œuvres ne peuvent être véritablement comprises dans le paradigme de la cognition, qui traite des représentations et/ou plus largement du vécu, ni dans celui de la communication qui traite des documents.

Elles ont donc un caractère exemplaire. Elles restent indépendantes des métriques du temps historique comme des approximations du temps vécu. Leurs formes sont indéfiniment transposables, ce qui atteste de leur métastabilité.

Les œuvres doivent une bonne part de leur caractère exemplaire à leur complexité (apparente ou non) : elle témoigne de l’élaboration créatrice qui les rend mémorables.

Au croisement de diverses institutions sémiotiques, comme le mythe, le langage, la technique, les œuvres d’art s’imposent. Science de la littérature, iconologie, musicologie, chorégraphie, dramaturgie, cinématographie, sont autant de domaines pour une théorie des œuvres, ou opératique — qui ne se réduit ni à une esthétique, ni à une sémiotique des canaux sensoriels.

Irremplaçables par ce qu’elles taisent, ce qu’elles évoquent et ce qu’elles incarnent par leur présence, les œuvres ne sont reproductibles que par défaut.

Aussi, les spectacles vivants, les musées, les festivals, les voyages culturels composent-ils un secteur économique important et en croissance mondiale. Cependant, alors que l’idéologie managériale préfère réduire la création aux produits des industries du divertissement, il importe de prendre au sérieux la culture : c’est là un impératif de pluralisme, de liberté, et même à présent de survie.